La doctrine de l’estoppel trouve son origine dans le domaine du droit privé et, même si, dans le droit de la famille, son caractère obligatoire est atténué étant donné qu’elle porte sur des questions qui ne relèvent pas du droit dispositif (à l’exception des pensions compensatoires ou des indemnisations en vertu de l’article 1438 du Code civil) puisqu’il s’agit de questions d’ordre public où doit primer le concept de l’intérêt de l’enfant mineur, il n’en est pas moins vrai que les mesures adoptées à la suite de la rupture de la cohabitation ont une importance transcendantale sur l’évolution ultérieure de la procédure judiciaire.
En ce sens, la doctrine de l’estoppel permet d’appliquer ces déclarations d’intention, généralement tacites, qui se matérialisent en une série d’actes suscitant la confiance de la partie adverse (qui agit au gré de ces actes), conformément aux règles de la bonne foi, mais que prétendrait ensuite omettre ou annuler la personne qui les avait adoptés librement et volontairement à un moment antérieur.
Ainsi, la doctrine de l’estoppel permet de faire valoir auprès des tribunaux les actes réalisés librement et volontairement et dont la partie prétend ensuite se rétracter. La raison en est simple et peut être clairement illustrée par un exemple : Si une des parties contribue volontairement au maintien de l’autre partie moyennant une provision mensuelle X, quel juge pourrait omettre cette situation dans le cadre d’une procédure ultérieure dans laquelle cette obligation de décaisser ces paiements est réclamée à la partie ? Probablement aucun juge n’omettrait une telle situation. Cela est dû au fait que la partie connaît le mieux la réalité de sa situation et que, si elle a décidé librement et volontairement d’effectuer ces paiements, la raison indique qu’il convient de les instaurer légalement, étant donné que ladite partie contrainte avait déjà instauré ces paiements et pour autant que les circonstances n’aient pas changé.
Comme nous l’avons mentionné précédemment, la force de cette doctrine est atténuée dans le droit de la famille, étant donné que les questions examinées sont soumises au contrôle de l’ordre public et, dans tous les cas, doivent respecter le principe fondamental de la protection des intérêts des enfants mineurs .Toutefois, cela ne signifie pas que ces mesures, adoptées librement et volontairement, ne produisent pas des effets dans la litis matrimoniale, tout au contraire. Ainsi, toute conduite adoptée peut influencer le pouvoir de décision du juge, principalement dans le cadre des mesures à caractère économique.
C’est la raison pour laquelle un conseil professionnel s’impose non seulement après le déclenchement de la crise matrimoniale, mais aussi auparavant, étant donné qu’il est très habituel dans notre pratique professionnelle quotidienne de recevoir des clients qui viennent chercher des conseils en dernière instance et avec une marge de manœuvre limitée.
Miguel Morillon
Avocat au Barreau de Madrid