LE CONTRAT DE FRANCHISE CONSTITUE L’UN DES CAS DE FIGURE ISOLÉS DE LIEN JURIDIQUE ENTRE DES PERSONNES QUI N’ONT PAS ENCORE LA QUALITÉ DE PARTIES CONTRACTANTES.
1. La phase précontractuelle.
Le contrat de franchise constitue l’un des cas de figure isolés de lien juridique entre des personnes qui n’ont pas encore la qualité de parties contractantes. Cette mesure exceptionnelle obéit à la nécessité de s’assurer que le franchisé donne son consentement en pleine connaissance des conditions de franchise et à l’issue d’une période de réflexion (d’une durée de vingt jours). L’existence même de ce devoir précontractuel du franchiseur témoigne du fait que la protection législative est axée sur l’autre partie contractante : le franchisé.
La principale objection à l’information précontractuelle visée à l’article 3 du décret royal 2485/1998 réside dans le fait qu’il s’agit là du seul aspect de la franchise auquel le législateur s’est intéressé, puisque ce dernier passe sous silence tout ce qui a trait au cœur de la franchise, en l’occurrence les droits et les devoirs contractuels. L’amputation délibérée du contenu contractuel pose la question de savoir s’il n’aurait pas mieux valu élaborer une réglementation exclusivement précontractuelle sachant qu’il est irréfutable que la plupart des conflits entre parties éclatent généralement après la signature du contrat et ne trouvent pas leur origine dans des causes préalables à sa conclusion.
Conformément à l’article 3 du décret royal susvisé, le franchiseur est tenu de fournir l’information précontractuelle au moins vingt jours avant la signature du contrat ou le premier versement du franchisé. Il existe donc bel et bien une relation juridique préalable à la signature du contrat qui explique la communication de certaines informations quasi-confidentielles, ainsi que la fixation des conditions requises quant à la validité du contrat.
Il ne semble cependant pas que l’on puisse qualifier d’information précontractuelle les informations préalables au premier versement du franchisé. Le simple versement d’arrhes confirme en effet qu’un contrat de franchise a été conclu. Dès lors, l’information ne peut plus être qualifiée de précontractuelle.
Le devoir d’information précontractuelle obéit à la prétention d’éviter la moindre fissure dans le consentement du franchisé. Or, paradoxalement, bien que l’information précontractuelle constitue l’axe central du décret royal 2485/1998, nul ne s’est soucié de prévenir les effets juridiques qui se produisent en cas de manquement à ce devoir d’information, même si l’obligation de fournir des informations véridiques et non mensongères va dans ce sens, il est vrai.
Dans ce chapitre, nous entendons analyser la responsabilité précontractuelle en tant que réponse juridique à tout manquement au devoir d’information précontractuelle. Il est difficile d’attribuer une quelconque efficacité juridique au manquement à cette obligation légale si le contrat de franchise n’est pas conclu. Il convient donc de définir les difficultés qui entravent sa mise en œuvre.
En cas de rétractation du franchisé au nom de son droit légitime de ne pas prendre part à l’affaire, il n’y a manquement au devoir de confidentialité que s’il y a abus de l’information précontractuelle (article 1902 du Cc).
En outre, en cas d’expiration du contrat, il y a deux types de manquements possibles : le manquement au devoir d’information et l’inexactitude des informations fournies.
En ce qui concerne le premier, le manque d’information précontractuelle se traduit par une violation de la légalité en vigueur qui entache le contrat de franchise.
Par ailleurs, les conséquences juridiques de l’omission de certains éléments dépendent du dommage qui est causé et de leur capacité à vicier le consentement du franchisé.
2. Le contenu essentiel du contrat de franchise.
Les matières qui se retrouvent tout naturellement dans la rédaction du contrat sont : le savoir faire, la marque et les signes de ralliement, l´indépendance des parties, la propriété de la clientèle, droits et obligations du franchiseur et franchisés, les approvisionnements exclusifs, détermination du prix des approvisionnements exclusifs, les exclusivités autres que d´approvisionnements, droit de la concurrence, droit d´entrée, redevances, contributions à la publicité nationale et locale, la durée, l´expiration du contrat, la non concurrence postcontractuelle.
Ce ne sont pas les parties au contrat qui déterminent le qualificatif de contrat de franchise.
C´est la réalité de l´opération économique-juridique qui confère au contrat de franchise sa qualité de contrat de franchise
C´est pourquoi le tribunal peut requalifier le contrat. C´est ainsi qu´il arrive que des contrats dits de franchise soient requalifiés de contrats de concession ou de contrats de travail.
Voyons le contenu essenciel du contrat :
– L´intuitus personae, cette expression signifie que le contrat est conclu en considération de la personne. De tous les contrats de la distribution, le contrat de franchise est celui qui est le plus fortement marqué par l´intuitus personae.
– Le caractère sui generis, c´est à dire qu´il n´y a pas un cadre rigide et un modéle type imposés par la loi comme c´est le cas par exemple pour les statuts d´une société commerciale.
– Nous proposons un plan type à titre indicatif et non impératif. ( préambule, objet du contrat, marque, obligations etc..)
– D´autre part le contrat de franchise est en grande partie un contrat d´adhésion. C´est un contrat élaboré par une partie ( le franchiseur ) à laquelle l´autre partie est invitée à adhérer.
– Le contrat de franchise est toujours écrit. La sagesse l´impose catégoriquement dans l´intérêt des deux parties
– Le contrat de franchise est un contrat bilatéral, c´est à dire qu´il lie le franchisé et le franchiseur. Il n´existe pas en franchise un contrat qui lie le franchiseur d´une part et l´ensemble des franchisés d´autre part. Les tribunaux considèrent de plus en plus souvent que le franchiseur à des obligations vis a vis du réseau compte tenu de l´interpretation et l´éxécution du contrat de franchise.
– La plupart des contrats sont établis en deux exemplaires.
– En cas de litige entre les parties, le Tribunal de Commerce est normalement compétent. Quel tribunal de Commerce ? Du fait d´une disposition du contrat. Il s´agit presque toujours du Tribunal du siège de l ´entreprise franchiseur
3. Le prolongement postcontractuel.
Le contrat de franchise ne déploie pas uniquement ses effets avant sa signature, en vertu du devoir d’information précontractuelle, mais aussi a posteriori, puisqu’il continue à conditionner le comportement commercial des contractants même après son expiration.
On peut citer à titre d’exemple le devoir de mettre un terme à toute utilisation de la marque ou des signes de ralliement après l’expiration du contrat de franchise, ou encore l’obligation de verser une indemnisation au titre de la clientèle, comme nous allons le voir plus bas. Il existe deux devoirs postcontractuels significatifs : le devoir de confidentialité (qui est reconnu légalement) et l’obligation de non-concurrence (de par son importance juridique).
L’article 4 du décret royal susvisé impose au franchisé un devoir de confidentialité à l’égard de toutes les informations précontractuelles qui lui sont communiquées par le franchiseur ou qui doivent l’être. Sont donc expressément exclues de ce devoir les informations obtenues dans le cadre de la relation commerciale qui ne sont pas protégées, bien que cela puisse paraître incompréhensible, sans préjudice de la bonne foi.
En conséquence, bien qu’étant un élément essentiel de la franchise, force est de constater que le savoir-faire ne jouit pas à ce jour d’une pleine couverture juridique puisque le devoir de confidentialité est limité à l’information précontractuelle.
Il y a lieu d’en déduire que la conclusion d’un contrat de franchise a pour effet de transformer en responsabilité contractuelle la responsabilité encourue en cas de manquement au devoir de confidentialité. Il convient toutefois de souligner que si la divulgation des informations assujetties à cette obligation intervient avant la conclusion du contrat, le franchisé n’a qu’une responsabilité extracontractuelle.
Contrairement au devoir légal de confidentialité, l’interdiction de concurrence n’est contraignante que si elle figure expressément dans le contrat de franchise.
En principe, aucune disposition du décret royal 2485/1998 ne permet de préjuger de ce devoir du franchisé. Il faut toutefois souligner que certains principes, comme la bonne foi, lui interdiraient d’exercer toute activité constituant un acte de concurrence déloyale.
Il convient de rappeler à cet égard que la Sté Pronuptia s’est prononcée en faveur de la compatibilité de la clause de non-concurrence avec l’article 85.1 du Traité CEE, toujours durant une période raisonnable après l’expiration du contrat et dans un secteur où il pourrait faire concurrence à l’un quelconque des membres du réseau. En droit espagnol, seul le contrat d’agence est en mesure d’éclaircir cette question puisqu’il reconnaît la possibilité de faire figurer dans le contrat l’interdiction de toute concurrence pendant une période maximum de deux ans à compter de la date d’extinction du contrat, et ce dans l’ensemble du secteur confié à l’agent.
Miguel MORILLON
mmorillon[at]morillon.es
Avocat Madrid